La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a présenté son rapport annuel 2024 sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. Un document de référence qui alerte : la France fait face à des niveaux inédits de violences racistes et antisémites, sur fond de tensions politiques et internationales.
👉 3 144 faits recensés par les services officiels en 2024, soit un chiffre stable par rapport à 2023, mais qui reste historiquement élevé.

👉 Parmi eux, 1 570 actes antisémites ont été enregistrés (contre 1 676 en 2023), soit une légère baisse, mais des violences plus graves :
- 106 agressions physiques
- 192 actes signalés dans le milieu scolaire
- plusieurs attaques contre des synagogues, dont l’incendie de celle de Rouen en mai 2024
- une agression sexuelle à caractère antisémite sur une enfant de 12 ans à Courbevoie
👉 Concernant les actes antimusulmans, 173 faits ont été comptabilisés en 2024, en baisse par rapport à 242 en 2023, mais toujours préoccupants :
- menaces verbales
- dégradations de mosquées
- actes de harcèlement dans l’espace public
La CNCDH note que ces chiffres restent sous-estimés, car de nombreuses victimes n’osent pas porter plainte.
👉 Pour les autres faits racistes et xénophobes (hors antisémitisme et antimusulmans), 1 401 actes ont été recensés, en hausse de 15 % par rapport à l’année précédente. Ces actes visent en particulier les personnes perçues comme noires, maghrébines ou asiatiques.
👉 En Outre-mer, la CNCDH souligne la persistance de discriminations systémiques, liées à des préjugés coloniaux encore très ancrés et à des retards d’investissement public. Le rapport pointe des taux de non-recours au droit particulièrement élevés, faute de structures d’accompagnement accessibles.
🔎 Ces chiffres s’appuient sur une méthodologie solide :
- recueil des procédures enregistrées par la police et la gendarmerie (via le SSMSI)
- signalements issus du renseignement territorial (DNRT)
- analyses croisées avec les enquêtes de victimation (Insee, ONDRP)
- le Baromètre racisme CNCDH, mené auprès d’un échantillon représentatif de 1 210 personnes
Malgré un léger rebond de l’indice de tolérance, la CNCDH constate une banalisation des discours de haine, notamment dans l’espace médiatique et politique, où la rhétorique de la « décivilisation » ou de « l’ensauvagement » a contribué à légitimer des propos racistes.
« Il est impératif de passer de la parole aux actes », avertit Jean-Marie Burguburu, président de la CNCDH. « Nous avons les outils juridiques, mais encore faut-il les appliquer sans relâche ».
La Commission recommande :
✅ de réunir le comité de suivi du plan PRADO au moins deux fois par an
✅ de renforcer la formation des magistrats et enquêteurs, notamment sur les mécanismes du racisme systémique
✅ de soutenir les associations locales qui accompagnent les victimes
✅ d’encourager la recherche sur l’impact sanitaire et psychologique du racisme
Claire Lallemand, rapporteure du groupe de travail, insiste : « Le racisme tue, mais il blesse aussi de manière invisible. Chaque micro-agression, chaque humiliation, chaque refus d’embauche laisse des traces profondes ».
La CNCDH rappelle enfin qu’elle poursuivra son rôle d’observatoire indépendant, pour alerter les pouvoirs publics et la société civile. « Face à la montée de l’extrême droite et à la fragmentation de la cohésion sociale, la vigilance n’a jamais été aussi indispensable », conclut le rapport.